training-plan planificationL'objectif de cet article est de présenter des exemples de programmation, puis de proposer les méthodes de suivi, de contrôle et de régulation du processus dynamique qu'est l'entraînement.

Les principes théoriques de l'organisation de l'entraînement les plus connus et utilisés dans le monde ont été élaborés en ex-URSS dans les années 1950 (Matveiev, 1980). Les concepts véhiculés eurent un impact d'autant plus important dans les pays de l'autre côté du « rideau de fer » dans les années 1960-1970, que les athlètes de l'Est dominaient la scène internationale et que peu d'autres théoriciens vinrent analyser et critiquer les théories présentées. Aussi, pendant longtemps, malgré l'absence de validation scientifique, les modèles de périodisation proposés par Matveiev constituèrent l'unique référence et furent fortement disséminés dans le sport de haut niveau.

Des critiques furent néanmoins opposées (Tschiene, 1985. 1990 ; Werchoschanski, 1992a, 1992b, 1999) :

  • l'organisation « mécanistique » sous forme de cycles et de périodes préétablies ne correspondait ni aux lois du développement physiologique, ni aux contraintes du calendrier sportif moderne. Les situations vécues, en particulier dans les sports collectifs et les sports de puissance- force, s'accommodaient mal de la longue période de préparation générale préconisée par Matveiev.
  • Enfin, même dans les sports d'endurance, le succès des athlètes africains dont l'entraînement était beaucoup plus « instinctif » et ne correspondait pas aux modèles rigides et rigoureux des athlètes de l'Est, souleva beaucoup d'interrogations. Tschiene (1985) souligna aussi l'importance que devaient avoir les exercices de compétition et l'individualisation des charges et méthodes d'entraînement aspects que Matveiev ne considérait pas comme essentiels (Werchoschanski, 1999).
  • Enfin, le développement des sciences du sport et de la physiologie appliquée permit l'émergence de nouvelles connaissances, parfois contradictoires avec les principes émis par Matveiev. Concernant le développement, la stabilisation, l'interaction et le désentraînernent des différentes qualités physiques. les spécificités morphologiques et fonctionnelles des athlètes élite ou les processus d'adaptation-désadaptation, la littérature scientifique foisonnante des trente dernières années permit de proposer des principes ayant une base « biologique » beaucoup mieux étayée que dans les travaux soviétiques de l'après-guerre.

PLANIFICATION DE L'ENTRAÎNEMENT

Le but de la planification de l'entraînement est d'obtenir la meilleure performance possible le jour J. Pour cela, les charges de travail sont programmées à l'avance en périodes spécifiques ou « cycles ». À des périodes de travail importantes en volume, spécifiques en intensité, succèdent des périodes de repos relatif appelées périodes d'« affûtage ». La durée des cycles tient compte de l'adaptation physique de chaque sportif. Elle cherche à prévenir la fatigue et le surentraînement. Plusieurs microcycles forment un macrocycle, plusieurs macrocycles un mésocycle.

Un exemple de planification annuelle avec trois grandes périodes est donné dans la figure ci-dessous.

Un exemple de planification annuelle avec trois grandes périodes

Charge hebdomadaire de travail d'un groupe de dix-huit nageurs de haut niveau de Toulouse pendant les 44 semaines d'une saison. Les valeurs sont des moyennes ± SE : UE = unité d'entraînement. La saison est découpée en trois grandes périodes correspondant aux trois compétitions les plus importantes.

L'organisation la plus couramment préconisée consiste en une réduction progressive du volume sous forme de cycles relativement longs pour progressivement augmenter l'intensité et la spécificité. À l'approche des compétitions, la durée des cycles se réduit.

Principales étapes dun programme de préparation physique en endurance

Principales étapes d'un programme de préparation physique en endurance. (D'après Hawley el al., 1997).

Une question centrale consiste en la répartition du travail entre des périodes cherchant essentiellement des adaptations centrales (cardio-vasculaire. respiratoire, etc.) et des périodes visant prioritairement des adaptations périphériques (musculaires). Dès lors, la place de la musculation joue un rôle essentiel quant au type de programmation proposé. Werchoschanski (1992) propose d'alterner des blocs « force » et des blocs « spécifiques » ou « techniques ».

Schéma théorique de programmation pour les disciplines de force-vitesse

Schéma théorique de programmation pour les disciplines de force-vitesse. (D'après Werchoschanski, 1992).

Schéma théorique de programmation pour les disciplines dendurance

Schéma théorique de programmation pour les disciplines dendurance 02

Schéma théorique de programmation pour les disciplines d'endurance. (D'après Werchoschanski, 1992).

ligneo

INFLUENCE POSITIVE ET NÉGATIVE DE L'ENTRAÎNEMENT

La performance est liée à la quantité de travail. L'entraînement produit à la fois un effet positif et un effet négatif (Banister et Calvert, 1980). L'effet positif correspond à l'amélioration de l'aptitude physique, l'effet négatif à la fatigue. La performance correspond à la différence entre les effets positifs de gain en aptitude physique et ceux négatifs assimilés à la fatigue. Chacun de ces effets peut être calculé à l'aide d'une fonction mathématique.

Représentation schématique des fonctions positive et négative après une séance

A. Représentation schématique des fonctions positive et négative après une séance d'entraînement, illustrant respectivement la fatigue et l'aptitude. Au début. L'intensité de la fatigue est supérieure à l'aptitude puis les effets s'inversent. Cela explique l'amélioration plus tardive des performances. B. Représentation schématique de l'influence négative (IN) et positive (IP) de l'entraînement (somme des deux fonctions) sur la performance après une séance d'entraînement. IN représente la baisse initiale de la performance liée à l'effet dominant de la fatigue et IP la phase de compensation liée à l'effet dominant du gain d'aptitude.

Un exemple concret de visualisation de l'aptitude et de la fatigue est présenté clans la figure ci-dessous. Les trois périodes d'affûtage aboutissent à une disparition de la fatigue accumulée au cours des semaines précédentes.

Comparaison entre les performances réelles et les performances modélisées au cours dune saison dentraînement chez des nageurs de haut niveau

Comparaison entre les performances réelles et les performances modélisées au cours d'une saison d'entraînement chez des nageurs de haut niveau de Toulouse. B. Influence positive et négative calculée par le modèle à partir de la charge d'entraînement et des variations de performances.

ligneoLES MÉSOCYCLES

Les mésocycles sont variables d'un sport à l'autre, et d'un préparateur physique à l'autre. Leur durée peut varier de plusieurs mois (mésocycles longs) à quelques jours (mésocycles courts).

Mésocycle long (quatre à six mois)

Le principe de ce cycle est d'enchaîner quatre périodes de préparation physique différentes :

  • 1. Préparation générale,
  • 2. Préparation aérobie,
  • 3. Préparation anaérobie
  • 4. et affûtage.

Un exemple de mésocycle de vingt-six semaines est présenté dans le tableau ci-dessous.

Il est reproduit deux fois dans l'année pour une compétition importante d'hiver et/ou d'été type championnats.

Exemple de mésocycle de vingt-cinq semaines,composé de quatre macrocycles différents. (D'après Maglisho, 1988).

 Mésocycle    Préparation aux championnats nationaux d'hiver
 Macrocycle  Préparation générale  Cycle aérobie  Cycle anaérobie Affûtage et compétition
 Microcycle  Semaines 1 à 3  Semaines 4 à16  Semaines 17 à 22 Semaines 23 à 25
  • Chaque cycle a pour but de développer une qualité énergétique particulière.
  • Après une préparation générale d'une à trois semaines, le cycle aérobie dure deux à trois mois.
  • Chaque mois est divisé en microcycle de quatre semaines comprenant trois semaines de travail et une semaine de récupération.
  • La récupération est obtenue par une diminution de 30 à 40 % du volume voire de l'intensité.
  • Le cycle anaérobie dure six à huit semaines pendant lesquelles l'intensité est augmentée et le volume plus ou moins réduit.
  • Le cycle terminal ou affûtage dure deux à quatre semaines. Il aboutit à la compétition et correspond à une réduction progressive et importante de 30 à 40 % du volume. Son but est de favoriser la récupération et de diminuer la fatigue accumulée au cours des cycles précédents. L'affûtage est considéré comme réussi si le gain de performance est supérieur à 3 %.
  • La périodisation décrite dans le tableau présente certains avantages. L'augmentation de l'intensité des charges de travail est progressive. C'est un facteur déterminant de l'adaptation et de la tolérance aux charges de travail.
  • Le développement des mécanismes aérobies en première intention assure une meilleure récupération des séances anaérobies réalisées ensuite.

Cette périodisation a cependant des limites. Au-delà de dix semaines de travail aérobie, les gains en V02max peuvent plafonner. Il faut donc augmenter les charges d'entraînement pour augmenter les gains de VO2max. En cas de plafonnement de VO2max des gains supplémentaires de performances peuvent être malgré tout obtenus après 20-30 semaines d'entraînement. Ils correspondent à des gains de rendement musculaire et/ou à l'amélioration du seuil anaérobie et/ou à des gains en capacité anaérobie. La nécessité de ces cycles longs est donc largement discutée, d'autant qu'un volume de travail élevé maintenu pendant de nombreuses semaines s'accompagne d'une dépression des fonctions immunitaires. Il favorise la sensibilité aux infections, en particulier aux infections ORL (Dyne et Gleeson, 1998). L'ensemble de ces effets délétères conduit à des planifications plus courtes associant des semaines d'entraînement intense à des semaines de repos relatif plus fréquentes.

Mésocycle de durée moyenne (trois à quatre mois).

Ce type de mésocycle est divisé en deux périodes de huit à dix semaines chacune. La première période est divisée en trois cycles de trois semaines enchaînant un cycle d'endurance aérobie, un cycle de puissance maximale aérobie et un cycle de puissance anaérobie.  Après une semaine de récupération active, une deuxième période reproduit des cycles identiques à la première mais de deux semaines au lieu de trois.

Un exemple de mésocycle de seize semaines est présenté dans le tableau.

Mésocycle Préparation aux jeux du Pacifique 1999
Macrocycle Endurance PMA Anaérobie Récup Endurance PMA Affûtage
Microcycle 3 Semaines 3 Semaines 3 Semaines 1 Semaines 2 Semaines 2 Semaines 2 Semaines

Exemple de mésocycle de seize semaines, composé de deux fois trois macrocycles différents (d'après Toureski [1999], entraînement de Mickel Klim et Alexander Popov, recordman du monde de natation.

Mésocycle de courte durée (inférieur à un mois)

  • Ce mésocycle est basé sur des périodes de trois à quatre semaines reproduites tout au long de l'année. Chaque période est composée de deux ou trois semaines de travail et d'une semaine de repos relatif.
  • Le volume de travail est relativement constant. Seul le nombre de sollicitations très intenses change.
  • Par exemple, la première semaine d'un cycle comporte deux séances intenses, la deuxième semaine trois, la troisième quatre, puis la quatrième seulement deux pour permettre au sportif de récupérer.

Cette programmation à la semaine à des avantages. Elle assure une prise en compte plus précise de la récupération à la fin de chaque cycle. Cette récupération est vérifiée soit à l'aide d'un questionnaire de fatigue, portant par exemple sur la qualité du sommeil et l'appétit, soit à l'aide de tests de terrain : des séries d'exercices « types » reviennent régulièrement en début de cycle avec contrôle de la fréquence cardiaque voire du lactate (Hooper et Mackinon, 1995).

Quand un sportif est fatigué, les stimulations de la semaine diminuent pour faciliter la récupération. Par exemple, au lieu de trois ou quatre stimulations prévues pour la semaine, le préparateur physique n'en propose que deux jusqu'à récupération complète.

Avec ce système, il a pu être observé que la récupération d'une seule séance particulièrement intense pouvait nécessiter plus d'une semaine de repos actif et donc perturber l'ensemble des prévisions initiales d'entraînement. Ce système permet aussi à un sportif blessé de réintégrer un groupe plus facilement sans être obligé de sacrifier de grandes périodes d'entraînement spécifique et sans perturber la préparation générale du groupe.

Planification des charges de travail du nageur Grant Hackett

Planification des charges de travail du nageur Grant Hackett, recordman du monde de natation. Chaque semaine le volume de travail est relativement constant et peu élevé pour un spécialiste de 1 500m NL. En revanche, le nombre de semaines de repos complet est limité à une seule par an.

Au cours de ces mésocycles, les séances intenses sont très typées. Elles ne stimulent qu'un seul domaine énergétique. Trois types de séances reviennent régulièrement : séance de VO2max de tolérance au lactate et de sprint. Toutes les autres séances sont composées d'un travail de récupération de type aérobie et/ou d'exercices de technique.

Les séances intenses sont espacées au maximum dans la semaine pour augmenter la récupération physiologique entre deux séances du même type. Par exemple, une séance de VO2max le mardi n'est pas répétée avant le vendredi.

Mésocycle de très courte durée (onze jours)

Ce mésocycle est composé de trois microcycles de trois jours encadrés par un jour de récupération active. Le premier microcycle d'endurance aérobie comporte trois séances par jour. Le quatrième jour est un jour de récupération active. Le deuxième microcycle est consacré au développement de la puissance maximale aérobie et de la tolérance au lactate. Le huitième jour est un jour de récupération active. Le troisième microcycle est consacré à l'entraînement de la vitesse et à la compétition.

Jours Microcycles Commentaires
1 Microcycle 1 Endurance Entraînement < au seuil
Trois sessions par jour
Quelques sprints très courts
2
3
4 Récupération Active et spa, sauna, massage
5 Microcycle 2 Puissance Transition vers la puissance maximale aérobie et la tolérance au lactate
6
7
8 Récupération Récupération Active et spa, sauna, massage
9 Microcycle 3 Sprint Travail de la vitesse,
utilisation des techniques de survitesse
Compétition vraie ou simulée
10
11

 Exemple de mésocycle de onze jours, composés de trois microcycles différents.

ligneoCas particulier des sports collectifs : exemple du football

La préparation physique du joueur de football répond à des objectifs multiples parfois contradictoires, comme par exemple améliorer en même temps les qualités de vitesse et les qualités aérobies. A cette difficulté est associée la contrainte que représente la multiplication des compétitions avec parfois plus de deux matchs par semaine. Il appartient donc au préparateur physique de combiner les différentes formes de travail pour atteindre le plus grand nombre d'objectifs possibles.
En football, consacrer quatre voire huit semaines au travail des qualités aérobies en début de saison est largement discutable. Il est en effet plus logique de consacrer du temps aux processus anaérobies. Ces processus sont essentiels lors des phases majeures de jeu : tirs, tacles, sauts, duels et sprints. Cette remarque ne s'applique peut-être pas aux joueurs de milieu de terrain ou ailiers latéraux. Chez ces joueurs, les qualités aérobies sont importantes. Ils organisent des actions de jeu moins exigeantes en énergie mais qui préparent les phases terminales du jeu qui elles sont déterminantes.
D'une façon générale chez les joueurs professionnels, l'objectif dominant est l'entretien des qualités physiques acquises. Après le match du samedi, les séances du début de semaine sont peu intenses, centrées sur la récupération. Les qualités spécifiques sont travaillées ensuite.

Exemple de microcycle dune semaine chez des joueurs professionnels de football

Exemple de microcycle d'une semaine chez des joueurs professionnels de football. Les séances de jeu sont assimilées à un entraînement au seuil anaérobie.

Des séances de musculations peuvent être proposées tous les deux jours à raison de trois par semaine au maximum (Cometti, 1993).

 

Exemple de semaine dentraînement comportant trois sessions de musculation

Exemple de semaine d'entraînement comportant trois sessions de musculation. (D'après Cometti 1993).

Certaines formes de travail de développement de la force permettent aussi d'améliorer les performances aérobies par le biais de l'activation neuromusculaire et de l'économie de course. Ces méthodes peuvent être pratiquées sans danger même chez les jeunes enfants. Le travail intermittent de type 15-15 permet également de travailler la vitesse tout en maintenant une fréquence cardiaque élevée.

Exemple de travail intermittent applicable aux footballeurs

Exemple de travail intermittent applicable aux footballeurs. (D'après Cometti, 1993).

Analyse des réponses individuelles aux charges de travail

La réponse individuelle à une charge de travail donnée varie énormément d'un sujet à l'autre, d'une période à l'autre. Elle dépend du niveau initial de la performance, du nombre d'années de pratique de chaque sujet et de la tolérance individuelle à une charge de travail donnée.
Cette réponse peut être étudiée à l'aide d'observations simples, de corrélations entre performances et charges d'entraînement, ou de modèles mathématiques.

Les performances peuvent être mesurées à l'entraînement lors de séries types revenant régulièrement ou lors des compétitions. En normalisant ces mesures et en les reportant sur un graphe, les sportifs et les préparateurs physiques peuvent visualiser immédiatement les réponses à l'entraînement.
Ces réponses sont positives en cas d'amélioration, négatives en cas de fatigue. En football, des mesures de vitesse lors de sprints de 10 m, de détente et de force de frappe peuvent être facilement réalisées à l'aide d'appareils de type cellules photoélectriques, tapis de Bosco ou radar.

À l'aide de corrélations simples, Mujika et al. (1996b) ont montré que les variables de l'entrainement étaient fortement liées aux performances chez certains sportifs alors que chez d'autres ces relations n'existent pas. La sensibilité à l'entraînement est donc différente d'un sportif à l'autre. Ces observations peuvent être très utiles aux sportifs et aux préparateurs physiques pour programmer de façon individuelle les séances, particulièrement au cours des phases d'affûtage.

Le principal avantage pratique des modèles mathématiques est de quantifier la réponse individuelle aux charges de travail. Ainsi, le temps de récupération peut être calculé pour définir la durée optimale d'une période d'affûtage. Des valeurs comprises entre quatre et trente-deux jours ont ainsi été calculées (Mujika, 1998).ligneo

SUIVI SCIENTIFIQUE ET BIOLOGIQUE

La charge de travail est le plus souvent décrite par le volume, l'intensité, la fréquence des séances et les exercices généraux comme la musculation. L'amélioration des performances nécessite des séances de travail dont le volume et les intensités sont élevés avec pour risque le surentraînement. La prévention de ce risque passe par un suivi scientifique et biologique.
Le suivi scientifique recherche l'effet des charges de travail sur les performances. Le suivi biologique étudie l'état de santé à l'aide de questionnaires de fatigue, de mesures de la fréquence cardiaque ou de la lactatémie, ou de dosages hormonaux. D'autres mesures biologiques sont à la base du suivi médical pour les pathologies avérées comme les anémies ou les infections virales ou bactériennes.

RELATION ENTRE LES CHARGES DE TRAVAIL ET LA PERFORMANCE

Méthode empirique

Cette méthode consiste simplement à observer les performances réalisées au cours de séries revenant régulièrement à l'entraînement. Pour comparer les différents types de performances entre elles, il suffit de les normaliser en les exprimant en pourcentage de la meilleure performance réalisée par le sportif. Par exemple, la meilleure performance d'un sujet sur 1 500 m nage libre est de 20 min 19 s. Elle est considérée comme la référence arbitrairement fixée à 100 %. Le sujet réalise un jour 21 min à l'entraînement. Normalisée, la performance est égale à (20 min 19 s x 100)/ 21 min soit 96,8 % de la performance de référence. Inversement, si le nageur réalise 20 min ce sera 101,6 %. Le même raisonnement peut être réalisé avec un 500 m ou un 3 x 200 m ou un 5 x 100 in ou tout autre exercice dans n'importe quelle spécialité qui revient régulièrement à l'entraînement. Le recueil régulier de la performance permet d'obtenir au fil des semaines les variations de la forme physique.

Variations quotidiennes des performances dun nageur mesurées à lentraînement

A.Variations quotidiennes des performances d'un nageur mesurées à l'entraînement.
B. Ces performances sont moyennées par semaine et associées aux variations du volume d'entraînement exprimé en unités arbitraires.

Les performances passent par des hauts et des bas avec un espacement régulier de quatre à sept jours. Ce délai correspond au temps de récupération des séances intenses. L'avantage de cette méthode est de visualiser immédiatement les réactions d'un sportif aux charges de travail réalisées. Elle permet aussi de calculer le temps de récupération nécessaire après une séance épuisante. Ces adaptations sont visualisées de manière différente, en moyennant les performances par semaine. La mise en relation avec la quantité de travail quotidienne ou hebdomadaire permet alors de juger plus facilement de l'effet d'une réduction ou d'une augmentation du volume de travail sur la performance.

Méthode scientifique

La réponse individuelle aux charges de travail peut être étudiée à l'aide de corrélations simples entre performances et charges de travail, ou à l'aide de modèles mathématiques plus complexes.

La figure ci-dessous présente un exemple de régression simple pour le nageur australien Grant Hackett (champion olympique du 1 500 in nage libre à Sydney). Le gain de performance entre deux compétitions a été mesuré au cours de dix compétitions sur une période de trente mois. Ce gain a été mis en relation avec le nombre de kilomètres nagés lors des cinq semaines précédant la compétition (A) et lors de la semaine 2 (B). Le volume optimal d'entraînement pour ces périodes d'affûtage peut être directement calculé à partir des corrélations établies. Il est obtenu pour les volumes d'entraînement les plus bas.

Relation entre la variation de performance exprimée en pourcentage

Relation entre la variation de performance exprimée en pourcentage (une valeur positive indique un gain de performance, une valeur négative indique une contre-performance) et le volume d'entraînement cumulé sur cinq semaines ( A, km) ou le volume de la semaine 2 (B, km). (D'après Chatard, 2003b).

À l'aide de régressions simples ou multiples, Mujika et al ont montré que plusieurs variables de l'entraînement étaient fortement liées aux performances chez certains nageurs, alors que pour d'autres cette relation n'était que très faible. La sensibilité aux charges de travail est donc différente d'un nageur à l'autre pour un même type de sollicitation. Ces observations constituent un argument en faveur d'une programmation individualisée de la préparation physique.

Les modèles mathématiques sont plus difficiles à utiliser. Ils nécessitent en effet le recours à des programmes informatiques spécifiques. Ils sont basés sur un raisonnement simple : la performance est le résultat de l'effet positif de l'entraînement appelé « aptitude physique », auquel il faut soustraire l'effet négatif de l'entraînement ou « fatigue ».

Le grand avantage de ces modèles est de calculer le temps de mise en jeu de l'aptitude ou de la fatigue. Ainsi, un temps de récupération peut être calculé individuellement pour chaque nageur. Il définit par exemple la durée optimale d'une période d'affûtage. Des valeurs aussi différentes que quatre ou trente-deux jours ont ainsi été calculées chez dix-huit nageurs de niveau international (Mujika, 1998). Les trois périodes d'affûtage (semaines 15, 30 et 42) se traduisent par une diminution importante de la fatigue accumulée au cours des semaines précédentes. Les modèles développés par Avalos et al. (2003) permettent d'étudier en plus les effets des périodes de travail à court (trois semaines), moyen (quatre à six semaines) et long terme (sept à huit semaines) sur une performance réalisée un jour donné. Ils permettent également d'étudier les effets retardés de la préparation d'une année sur l'autre. Les résultats montrent qu'il existe une très grande variabilité individuelle des réactions aux charges de travail, se modifiant largement d'une année sur l'autre. Ces modèles ont plusieurs inconvénients. Ils nécessitent un nombre élevé de compétitions. Ils ne fournissent aussi qu'une analyse retardée des effets de l'entraînement sur la performance. Parfois difficile à exploiter d'une année sur l'autre.

LES QUESTIONNAIRES DE FATIGUE

Leur avantage est de suivre au plus près les réactions des sportifs aux charges de travail. Le questionnaire le plus utilisé est sans doute le Profile of Mood States ou POMS (MacNair et al.1992).

Son inconvénient est de comporter soixante-cinq questions regroupées en six sous-classes (anxiété, dépression, agressivité, vigueur, fatigue et confusion), les réponses ne variant pas toutes dans le même sens que la fatigue.

Un autre questionnaire a été développé par la Société française de médecine du sport. Il est constitué de cinquante-quatre questions. Les sujets y répondent simplement par oui ou par non. L'addition des « oui » et des « non » permet d'obtenir un score. Un score supérieur à 20 indique un état de surentraînement probable. La Fédération française de natation utilise un questionnaire simplifié de huit questions (Chatard et al., 2003) interrogeant sur la perception de l'entraînement, la qualité du sommeil, les douleurs des jambes, la survenue d'infections, d'anxiété, d'irritabilité et la perception générale du stress quotidien. Chaque question est cotée de 1 à 7. La somme des réponses correspond au score de fatigue. Ce questionnaire a été validé comme un outil très sensible aux variations de charge de travail et de performance avec des coefficients de corrélation entre ces variables supérieurs à 0,70.

Exemples :

  • J'ai trouvé l'entraînement plus difficile
  • J'ai plus dormi
  • Mes jambes étaient plus lourdes
  • J'ai attrapé froid ou eu une infection
  • Ma concentration était plus difficile
  • J'ai travaillé moins efficacement
  • Je me suis senti plus irritable
  • J'ai été plus stressé à la maison, ou à l'école

LES MESURES DE FRÉQUENCE CARDIAQUE

Les mesures de la fréquence cardiaque (FC) sont devenues très répandues grâce aux fréquencemètres très performants apparus sur le marché. Leur principal intérêt réside dans la quantification de l'intensité de l'entraînement. Il existe en effet une relation quasiment linéaire entre la FC et la consommation d'oxygène. L'atteinte de la FC maximale définit 100 % de la consommation d'oxygène, 0 % correspondant à la FC de repos. Les limites de la mesure de FC tiennent au fait qu'il faut au moins 1 à 2 min pour atteindre des valeurs stables.

Ces mesures n'ont donc que peu d'intérêt au cours des séances de sprint. D'autres facteurs sont également susceptibles de faire varier la FC indépendamment de l'entraînement ou de la consommation d'oxygène (température intérieure et extérieure, durée de l'échauffement, émotions, fatigue, café et autres drogues).

En théorie, l'adaptation cardio-circulatoire d'un sujet se traduit, avec le temps, soit par une stabilisation de la FC moyenne associée à une augmentation des performances, soit par une diminution relative de la FC moyenne pour une même vitesse d'entraînement (amélioration du rendement).

L'interprétation de la FC reste malgré tout délicate. En effet, de grandes variations de la FC sont parfois mesurées d'un jour à l'autre. Elles peuvent correspondre soit à de simples variations du rendement musculaire (fatigue passagère des muscles), soit à des variations du volume plasmatique pouvant atteindre plus de 25 % sans qu'il s'agisse de déshydratation mais simplement de flux plasmatiques probablement d'origine protéique (Chatard et al., 1999).

Un retour rapide de la FC à un niveau basal représente-t-il un bon critère de récupération ?

Dans des conditions standard d'exercice et de mesure, la réponse pourrait être oui. Mais ces conditions sont rarement réunies. En effet, comment comparer la FC lorsque les exercices diffèrent les uns des autres par leur durée, leur intensité, et les conditions environnementales, de température notamment '? En pratique, si les conditions d'exercice sont comparables, seule la comparaison d'un sujet à lui-même présente une signification.

D'une part, la variabilité de la FC empêche toute comparaison d'un sujet à un autre. D'autre part, et de manière paradoxale, un individu ayant une hypertonie vagale pourrait être évalué comme présentant une bonne récupération alors qu'en tait la chute importante de la FC et de la pression artérielle après l'exercice l'expose à des pathologies.

L'indice de Ruffier-Dickson décrit en 1950 et calculé à partir de la FC mesurée avant et après trente flexions des membres inférieurs avait pour ambition d'étudier ce type de récupération. Il a été démontré depuis que cet indice ne présente pas d'intérêt médico-sportif majeur.

De la même façon, dans les années 1980, il a été montré qu'une augmentation de la FC de repos de cinq à dix battements au-dessus de sa valeur de base pouvait correspondre à un état de fatigue ou de surentraînement. En fait, ces observations n'ont pas été confirmées depuis (Hooper et Mackinon, 1995), et la mesure de la FC de repos n'est plus considérée comme un bon indicateur de la fatigue. Avant d'impliquer le surentraînement, il faut aussi vérifier la baisse des performances et l'absence d'infections, de stress émotif, de trouble du sommeil, de trouble de l'alimentation en glucides et de l'hydratation.

Pour autant, la mesure de la FC reste d'actualité dans le cadre de l'étude de sa variabilité. En effet, au repos, la FC varie avec des oscillations de basses ou de hautes fréquences. Ces oscillations sont principalement le reflet d'un équilibre entre le système cardioaccélérateur orthosympathique et le système frénateur parasympathique.

Le surentraînement se caractérise par une modification de ces spectres de fréquences. Le problème est que ces modifications peuvent s'effectuer dans les deux sens avec une dominante parasympathique ou orthosympathique. C'est donc le suivi itératif des sujets qui apporte le plus de renseignements. Ce suivi est facilité avec l'emploi des cardio-fréquencemètres permettant l'enregistrement de l'intervalle RR. Cependant, là encore, ces mesures restent discutées. L'unanimité des chercheurs est en effet loin d'être faite sur leur intérêt dans le cadre d'une application pour la préparation physique.

la fréquence cardiaque varie avec des oscillations de basse

Au repos, la fréquence cardiaque varie avec des oscillations de basse (orthosympathique) ou de haute (parasympathique) fréquence. Ces oscillations sont essentiellement le reflet de l'équilibre entre le système cardioaccélérateur orthosympathique et le système frénateur parasympathique.
Ces deux systèmes jouent un rôle important dans les deux types de surentraînement (ortho- ou parasympathique) observés en pratique sportive.

LE DOSAGE DE LA LACTATEMIE

La mesure du lactate sanguin [La] constitue un moyen très pratique de contrôle de l'entrainement et des performances.

À l'entraînement, elle permet d'identifier les intensités de travail. Jusqu'à environ 4 mmo1/l, le travail musculaire est à dominante aérobie. Au-delà de 4 mmo1/1, il devient mixte, puis lorsque l'intensité est maximale il devient à dominante anaérobie.

Au cours d'un cycle de travail de plusieurs mois ou semaines, la mesure de la lactatémie permet de quantifier les adaptations métaboliques :

  1. • amélioration de la capacité aérobie ou endurance par un décalage du seuil d'accumulation du lactate sanguin vers la droite
  2. • amélioration de la puissance et/ou de la capacité anaérobie par l'augmentation du taux de lactate sanguin.

Les techniques d'évaluation du métabolisme du lactate sanguin sont malheureusement très nombreuses. Il a ainsi été décrit plus d'une vingtaine de méthodes de détermination du seuil d'accumulation du lactate sanguin (SALS). Les protocoles associent de façon très variable le nombre et la durée des paliers de mesure. Ces méthodes donnent chacune des résultats différents. En pratique, pour que le suivi d'un athlète soit interprétable, il faut choisir une méthode et la conserver fidèlement. Les mesures de seuil les plus couramment utilisées sont la mesure du seuil 4 mmo1/1, le calcul de la pente d'accumulation du lactate sanguin à 45° et l'intersection des droites log-log puissance ou vitesse-lactatémie.

En compétition, les mesures de La-max permettent d'apprécier le caractère maximal d'une prestation physique et de compléter ainsi les sensations parfois subjectives des sportifs ou du préparateur physique. Elles permettent aussi d'apprécier les distances pour lesquelles le sujet est le plus entraîné ou le mieux prédisposé. En pathologie, elles permettent de quantifier l'état de fatigue d'un sujet (Chatard et al., 1988 ; Pelayo et al., 1996).

Pendant la récupération, la lactatémie peut rester élevée plus d'une heure. Il a été établi une relation inverse entre le niveau de la lactatémie et la performance réalisée pendant cette récupération. Les méthodes de récupération active visent toutes à faire chuter rapidement la lactatémie. Peu d'études ont cependant démontré clairement que ces méthodes permettaient une meilleure performance après la phase de récupération.

LES DOSAGES HORMONAUX

Le rôle du cortisol, de la testostérone, de l'adrénaline et des hormones de l'axe hypothalamo-hypophysaire ont clairement été démontrés dans l'adaptation à l'entraînement (Duclos et al., 1998). Cependant, la simple mesure de la concentration de repos de ces hormones n'a pas de relation franche avec la préparation physique, la performance ou le surentraînement (Chatard et al.,2002). Dans les années 1980-1990, le rapport testostérone sur cortisol, rapport d'une hormone anabolisante et d'une hormone catabolisante, a été très à la mode pour le suivi des nageurs de haut niveau (Mujika et al., 1996c).

Aujourd'hui, la mesure du rapport cortisol (forme hormonale active) sur cortisone (forme hormonale inactive), recueillie sur une diurèse nocturne ou de 24 h, semble être le meilleur témoin de l'activation de l'axe corticotrope (Chatard et al 2003). Mais ces dosages restent encore du domaine de la recherche.

De nombreuses méthodes de planification permettent d'arriver au même but : améliorer l'aptitude physique pour obtenir la meilleure performance possible le jour J de la compétition. Toutes ces méthodes présentent des avantages et des inconvénients. Chaque sportif y répond différemment. L'analyse de la réponse individuelle à l'entraînement est donc déterminante. Les observations simples, les corrélations entre performance et charge d'entraînement ou les modèles mathématiques permettent de prédire cette réponse au cours de toutes les phases de la préparation physique.

En pratique, la simple observation des performances mesurées à l'entraînement est un excellent moyen de suivi de l'entraînement. Les programmes informatiques permettent cependant une analyse plus fine de ces variations. La mesure du lactate et de la fréquence cardiaque, et les questionnaires de fatigue sont utiles pour un suivi quotidien des réactions du sportif. Les dosages hormonaux restent encore du domaine de la recherche. En revanche, en cas de pathologie, le suivi biologique reste la hase du diagnostic. Il recherche principalement l'existence d'anémie, d'hépatite virale ou de mononucléose infectieuse.

JEAN-CLAUDE CHATARD

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